• Article 1 : « La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée. »
• Article 11 : « Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence des autorités publiques et sans considérations de frontières. »
Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne
Open Access Now
Camps d'étrangers en Europe :
Ouvrez les portes !
Nous avons le droit de savoir, ils/elles demandent à être libres…
Derrière l’objectif officiel d’aller «vers une meilleure gestion des flux migratoires», l’institutionnalisation de la détention des étranger-e-s ne cesse de criminaliser celles et ceux que l’on désigne comme indésirables sans pour autant donner preuve d’efficacité par rapport à l’objectif de départ.
600.000 migrant-e-s environ sont détenu-e-s chaque année dans les pays de l’Union européenne, adultes et enfants, le plus souvent sur la base d’une simple décision administrative.
Leur détention – bien souvent nommée par des euphémismes comme « rétention » ou « maintien »– peut durer jusqu’à 18 mois, selon le droit européen, dans l’attente d’une expulsion qui n’aura lieu que pour la moitié des personnes en instance d’expulsion [1] et les renverra vers leur pays d’origine ou vers un pays tiers, avec lequel ils n’ont souvent aucun lien important.
Le fondement ? Deux textes européens prévoient la rétention administrative pour les migrant-e-s et systématisent une telle privation de liberté :
-
la directive relative à des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les États membres (directive « Accueil ») ;
-
la directive relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (directive « Retour » appelée aussi « directive de la honte »).
Leur crime ? Aucun.
Ces personnes sont uniquement venues ou ont séjourné de manière irrégulière dans le pays dans lequel elles sont enfermées.
Elles se sont déplacées conformément au droit fondamental de tout.e citoyen.ne du monde, à savoir quitter le pays où il/elle se trouve, y compris le sien[2], et à l’idée que l’Union européenne est un espace où les droits fondamentaux sont respectés.
Or, une fois enfermées, ces personnes ne sont pas seulement privées de leur liberté de circulation, mais aussi, le plus souvent, de leur vie privée et familiale ainsi que de conseils juridiques et/ou de soins de santé adéquats à leur situation, d’un contrôle juridictionnel effectif sur la privation de liberté et l’expulsion, etc.
La campagne Open Access Now, lancée en 2011 par les réseaux Migreurop et Alternatives Européennes, a pour objectif la fermeture de tous les camps d’étranger-e-s en Europe et au-delà et, en attendant, d’exiger et de renforcer la visibilité et la transparence sur les réalités de la détention des migrant-e-s.
Cette campagne est menée par un comité de pilotage international composé de
Migreurop,
Alternatives Européennes,
La Cimade (France),
Anafé (France),
Arci (Italie),
Sos Racismo (Espagne),
Ligue des Droits de l’Homme (Belgique),
Ciré (Belgique)
et Frontiers Ruwad (Liban).
Il s’agit, via les actions et les outils mis en place dans le cadre de la campagne, de faire connaître la réalité et les conditions de l’enfermement des étranger-e-s en Europe et au-delà, jouer un rôle d’alerte et de défense des étranger-e-s détenu-e-s et témoigner sur les conséquences de cet enfermement dans les camps, théâtres quotidiens de violations des droits fondamentaux.
Un des outils mis en place par Migreurop dans le cadre de la campagne Open Access Now est la carte interactive Close the Camps,
qui vise à promouvoir l’accès aux informations pour le plus grand nombre de personnes, en recensant les différents camps et des informations pratiques relatives à ces lieux.
La carte interactive vise également à mieux comprendre les conséquences de l’évolution des dispositifs sur la vie et les droits des personnes migrantes.
En effet, les États et institutions européennes tentent, tant bien que mal, de masquer cet aspect peu reluisant d’une politique qui se prétend par ailleurs respectueuse des droits.
Ainsi, aujourd’hui, dans la plupart des pays de l’UE, mais aussi dans les pays où la politique migratoire de l’Union se déploie et/ou avec lesquels celle-ci a signé des accords de voisinage, l’accès aux camps est strictement encadré, limité, voire empêché, pour les journalistes et la société civile.
Il est bien souvent difficile de s’entretenir avec les détenu-e-s. Seul-e-s les parlementaires disposent d’un droit de visite.
Si la directive « Retour » prévoit que « les organisations et instances nationales, internationales et non gouvernementales, ont la possibilité de visiter les centres de rétention », la Commission Européenne reconnaît dans le premier rapport d’évaluation de cette directive que le respect de cette possibilité n’est pas assuré dans 7 États membres.
Le constat que font nos organisations, engagées depuis plus de dix ans sur les questions d’enfermement, est beaucoup plus préoccupant.
Il est pourtant essentiel, qu’il s’agisse de plaider pour une « humanisation » des lieux d’enfermement – qui ne peut s’avérer qu’illusoire – ou pour la fermeture de ces lieux voire de s’assurer du respect des droits et de la législation en vigueur, de pouvoir accéder à une information claire sur l’existence et le fonctionnement des camps et de pouvoir en dénoncer les dysfonctionnements.
La campagne s’appuie par ailleurs, et afin de mettre fin à l’opacité qui entoure ces lieux, sur le droit à l’information garanti par l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux. Cet article condamne très clairement les « ingérences d’autorités publiques » qui empêcheraient les citoyen-ne-s d’accéder à l’information, et notamment à l’information concernant le fonctionnement des institutions.
Parce que l’enfermement a un coût financier et surtout humain insoutenable, qu’il est une source constante de violations des droits et que son efficacité au regard de l’objectif officiel de l’expulsion est contestable, nous demandons la fermeture des camps d’enfermement, quels que soient leurs noms et où qu’ils se trouvent, non seulement sur le territoire européen, mais aussi dans les pays partenaires de la politique migratoire européenne.
Tant que ces lieux existent en Europe et au-delà, parce que les citoyen-ne-s ont le droit de connaître les conséquences des politiques mises en place en leur nom, et les personnes détenues ont le droit de communiquer avec le monde extérieur, y compris publiquement, nous demandons :
- un accès inconditionnel de la société civile et des médias à l’information et aux lieux d’enfermement,
- que soient garantis dans les textes et en pratique le respect et l’exercice effectif des droits des personnes détenues qui ne doivent plus être confrontés à des traitements inhumains et dégradants
- que les parlementaires européen-ne-s et nationaux-ales et autres personnes, institutions ou organisations dont l’accès est garanti visitent les lieux d’enfermement et encouragent l’évolution des législations nationales et européennes pour mieux défendre les droits des étranger.e.s détenu.e.s.
CLOSE THE CAMPS
Une cartographie interactive pour dénoncer l’enfermement des étranger-e-s en Europe et au-delà.
La face cachée
des camps d’étranger.e.s en Europe
Rapport de la campagne Open Access Now
http://www.migreurop.org/IMG/pdf/facecacheecampsetrangers-okweb.pdf
Ce livret (30 pages - 2014) est organisé en cinq séquences :
- qui sont les personnes enfermées (1. Qui enferme-t-on ?),
- les motifs – officiels et réels – de l’enfermement (2. Enfermer, pourquoi ?),
- les lieux où cette privation de liberté s’opère (3. Enfermer, où ça ?),
- la façon dont elle se déroule (4. Comment enfermer),
- ainsi que les formes de contrôle démocratique existantes
(5. Quel(s) contrôle(s) démocratique(s) de l’enfermement ?).
Depuis les années 1990, l’enfermement est devenu un instrument privilégié de gestion des populations migrantes en Europe et au-delà.
Le seul motif de cette privation de liberté est le non respect des règles, souvent injustes, relatives au franchissement des frontières et/ou au séjour.
Elle constitue une source de violations permanentes de leurs droits.
Derrière l’objectif officiel de rationalisation de la gestion des flux migratoires, l’institutionnalisation de la détention des étranger.e.s vient criminaliser celles et ceux qu’on désigne comme indésirables, alimentant ainsi le racisme et la xénophobie.